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INRAE, agriculteurs : un grief qui dure

Ce jeudi 28 novembre 2024, vers 6 heure du matin, plusieurs syndicats, notamment la FNSEA, ont organisé une opération coup de poing devant le siège de l’INRAE à Paris. Leur but : protester contre les agissements de ce dernier qui vont à l’encontre des agriculteurs. En construisant un mur devant le bâtiment de la rue de l’université, les agriculteurs expriment toute leur colère, mais d’où viennent-elles et quelles sont leurs raisons ? Décryptage avec Emmanuel Lissajoux, président de la FDSEA de corrèze.

L’INRAE est un organisme public français créé en 2020. Il mène des recherches pour, notamment, répondre aux défis de l’agriculture durable. Ce dernier est donc censé trouver des solutions pour accompagner au mieux les agriculteurs français. Cependant, depuis plusieurs années, les syndicats agricoles pointent du doigt le fait que l’INRAE ne propose pas de solutions concrètes.

« L’institut nous prend pour des gros pollueurs »

Emmanuel Lissajoux, président de la FDSEA Corrèze, dénonce une incompréhension persistante entre les agriculteurs et l’INRAE : « Nous reprochons à l’INRAE de trop souvent pointer du doigt nos pratiques agricoles sans prendre en compte les efforts que nous faisons déjà. Leurs études mettent en avant les impacts environnementaux, mais sans proposer des solutions réalistes pour les agriculteurs. On a l’impression qu’ils alimentent une image négative de l’agriculture conventionnelle et justifient des réglementations toujours plus contraignantes, alors que nous avons besoin de soutien pour avancer vers des pratiques plus durables. » Emmanuel Lissajoux souligne un problème récurrent : « Ils nous critiquent sans vraiment nous accompagner. Les agriculteurs veulent évoluer, mais ils ont besoin de solutions concrètes pour le faire. Il ne suffit pas de pointer les problèmes sans offrir des outils pour les résoudre. » Pour l’INRAE, l’agriculture conventionnelle semble souvent synonyme de pollutions et de dégradations écologiques, ce qui alimente les tensions avec les agriculteurs.

« Les accords du Mercosur ne sont que la goutte d’eau »

L’une des préoccupations majeures des agriculteurs, mais aussi une des sources de leur mécontentement envers l’INRAE, reste l’accord commercial avec le Mercosur. Pour Emmanuel Lissajoux, cette négociation constitue une véritable menace : « Les accords avec le Mercosur représentent une vraie menace pour nos agriculteurs. On ne peut pas accepter une concurrence déloyale avec des produits qui ne respectent pas nos normes sanitaires, environnementales et sociales. Cela risque de faire chuter les prix, en particulier pour nos éleveurs, et d’aggraver la crise dans nos campagnes. » L’agriculteur dénonce la dérégulation que pourrait engendrer l’accord avec le Mercosur, un accord qui pourrait conduire à l’importation de produits agricoles moins chers, mais souvent moins respectueux des normes françaises en matière de qualité et d’environnement. De plus, il insiste sur l’aspect écologique de l’affaire : « C’est un non-sens écologique, car ces importations encourageraient la déforestation en Amazonie. » Un paradoxe qui, selon lui, serait à l’opposé des objectifs de durabilité que l’INRAE défend.

“Notre institut est une force pour l’agriculture française”

De son côté, l’INRAE explique, dans un communiqué diffusé aujourd’hui sur son site internet, que “Les critiques visant notre Institut ne rendent pas compte des recherches menées par les chercheurs, les ingénieurs et les techniciens d’INRAE sur le terrain et des résultats obtenus.” L’institut intègre les préoccupations des agriculteurs dans ses orientations de recherche en adoptant une approche collaborative et pluridisciplinaire, en particulier face aux défis environnementaux et économiques actuels. L’institution développe des projets de recherche en lien direct avec les besoins des agriculteurs, en impliquant ces derniers dans la conception et la mise en œuvre des recherches. Pour renforcer la collaboration sur le terrain, l’INRAE a récemment mis en place des dispositifs comme les plateformes de démonstration et les réseaux d’expérimentation participative, permettant aux agriculteurs de tester des innovations et de donner un retour d’expérience direct. En réponse aux critiques concernant la déconnexion de sa recherche avec les réalités agricoles quotidiennes, l’INRAE a intensifié ses interactions avec les exploitants agricoles, en veillant à ce que ses travaux tiennent compte des pratiques et contraintes concrètes du terrain. Cette démarche vise à garantir que les solutions proposées soient pragmatiques et directement applicables, et non simplement théoriques.

Dans un climat plus que tendu à la suite de nouvelles actions à Paris et à Nice ce matin, l’assemblée française a donc décidé, dans une grande majorité, de s’opposer au traité du Mercosur. Cette opposition apparaît comme une réelle victoire des syndicats agricoles aux yeux des Français, mais la vérité est tout autre. Avec plus d’un éleveur sur deux vivant avec moins de 600 euros par mois, un taux de suicide des plus élevé au monde et une centralisation des décisions, les syndicats appellent encore à de nouvelles actions visant une fois de plus l’INRAE, l’institut qui à sa création, devait renouveler le monde agricole français.

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